SI ON NE PEUT PAS FINANCER DE L’EMPLOI, IL FAUT S’ÉQUIPER

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Par le biais de la Cuma de Puygouzon en 2008, une dizaine de viticulteurs se sont regroupés pour s’équiper d’une machine à vendanger. Depuis, ils ont toujours opté pour une automotrice.

Historiquement, le vignoble était uniquement en vendange manuelle. Mais après la crise viticole survenue dans les années 2000, nous n’avions
financièrement plus la capacité de conserver cette main d’œuvre.

Témoignage de Sébastien FERAL, trésorier de la CUMA de Puygouzon, propos recueillis par Léni PELISSOU, journaliste au Paysan Tarnais.

Sébastien Feral fait partie de ces viticulteurs qui ont évolué dans leurs pratiques. Installé sur la commune de Cunac, il fait du groupe une nécessité aujourd’hui : “Nous sommes un noyau de viticulteurs installés
à Cunac, Saint-Juéry, Cambon, Bellegarde… On a toujours été un groupe bien soudé. Il y a près de 20 ans, on a eu une réflexion globale entre nous qui nous a amenés à une conclusion : si on ne peut pas financer de l’emploi, il faut s’équiper mécaniquement
.” Voilà pourquoi une douzaine de vignerons a décidé d’investir collectivement sur une première machine à vendanger, en 2008. Pour la financer, la Cuma de Puygouzon s’est trouvée être une solution pratique et crédible.

“ON VOULAIT FAIRE DE LA POLYVALENCE”

2008 marque un réel tournant pour les viticulteurs du secteur, qui possèdent près de 120 ha de parcelles. Ils investissent sur une première automotrice : le modèle SB60 de chez New-Holland. “Au début, on a passé
qu’une quarantaine d’hectares à la machine. Parce qu’on a toujours produit pas mal pour le vin primeur ici, qui dans son cahier des charges oblige à vendanger manuellement. Mais depuis, nous avons eu des dérogations pour les années de gel et de sécheresse notamment, et c’est
en train d’évoluer
”, commente Sébastien Feral.

Trois chauffeurs ont été désignés pour les périodes de vendanges. Cette première machine, achetée d’occasion à près de 60 000 €, a accompagné les producteurs jusqu’en 2014 pour le premier renouvellement. Le choix s’est cette fois-ci porté sur une NH 9040, en gardant toujours à l’esprit les particularités géographiques du secteur : “Nous avons beaucoup de pentes ici. La plus importante est chez moi je crois, à plus de 40%. C’est pour ça que nous avons toujours privilégié l’automotrice à la machine à vendanger trainée. Mais à chaque renouvellement, on se pose quand même la question.” Depuis le départ, les objectifs sont clairs : “On a tout de suite voulu que la machine soit polyvalente. Le choix de l’automotrice est avant tout un choix pour faire de la polyvalence. On vendange avec, on fait le prétaillage, elle nous sert de porteur, certains l’utilisent pour placer une cellule de pulvé…on essaie de l’amortir au mieux”, confie celui qui est en activité depuis 28 ans maintenant. À ce jour, 8 viticulteurs se partagent la machine à vendanger, sur environ 65 ha de vignes, et la vendange manuelle n’est plus d’actualité.


2021 : UNE MACHINE PLUS PUISSANTE

Le renouvellement le plus récent est intervenu il y a quelques années, en 2021. Toujours New-Holland, modèle 9050 cette fois-ci. Prix d’achat :
200 000 €. Soit un investissement plus de trois fois plus lourd que 13 ans auparavant. Un prix beaucoup plus élevé certes, mais en partie justifié selon Sébastien : “Le machinisme agricole connaît une augmentation
de prix en général. En ce qui concerne notre machine, on ne peut pas vraiment comparer. Celle-ci est bien plus puissante et mieux équipée que l’ancienne. Elle possède par exemple un trieur embarqué qui permet de nettoyer la vendange : rafles, sarments, feuilles…tout est évacué
”, indique le viticulteur.
Malgré un prix conséquent, l’équilibre est trouvé : “On arrive à maintenir un coût, qui n’est pas le plus bas des Cuma, mais qui reste moins cher qu’une entreprise par exemple. Avec en plus une flexibilité d’utilisation bien plus intéressante.” Également équipée de l’autoguidage ou de caméras sur différents postes, la machine permet “une meilleure sérénité au niveau de la conduite et de la surveillance de l’outil.” Que ce soit au niveau du tri ou de la qualité de récolte, “c’est quand même beaucoup mieux” se satisfait Sébastien Feral. L’automotrice fait toutefois partie des plus gros gabarits : “Elle est un peu plus grosse que la moyenne. Mais nous n’avons aucun souci avec les demi-tours notamment, la maniabilité est excellente et on tourne presque sur place.”

De la main d’œuvre jusqu’à la mécanisation, les viticulteurs du secteur ont vécu certaines années de transition : “Il a fallu adapter les vignes qui pouvaient être techniquement adaptées. Certaines ont été arrachées
puis replantées pour être mécanisables
”, raconte Sébastien.
Aujourd’hui, sur un parcellaire relativement morcelé, le débit de chantier fluctue entre 1h30 et 2h l’hectare environ. Pour un coût bien moindre qu’auparavant : “La main d’œuvre nous coûtait entre 1200 et 1300 €
de l’hectare. Désormais, on se situe plutôt autour des 350 € avec la machine.
” Un pari réussi donc !!

Et la récolte, comment s’annonce-t-elle ?

“Globalement sur le Gaillacois, 20% de pertes ont été annoncées à cause du gel. Personnellement, je suis à plus de 70%, et sur le secteur, plus de 50%. Le souci, c’est de voir comment on va facturer la rentabilité de la machine avec des vignes où quasiment toutes les parties basses sont gelées”, se désole Sébastien Feral. Les récoltes les plus précoces devraient intervenir fin août : “Si on a de fortes chaleurs d’ici là, ça va peut-être avancer un petit peu, si au contraire le temps est un peu plus doux, il faudra attendre début septembre.”